Cela fait maintenant pas mal de temps que je pratique le Krav-Maga. Pour eux qui ne connaîtraient pas, il s’agit d’une technique de combat (le terme me semble plus approprié que celui d’art martial), d’origine hongroise et israélienne, et qui constitue aujourd’hui l’une des bases d’entrainement à mains nues de pas mal d’unités spéciales de la police comme de l’armée. Et on y apprend beaucoup. Beaucoup plus, en fait, que juste à donner de grosses patates qui font mal.
1 – La modestie et le sens de la hiérarchie
Il est facile de se croire en super forme quand on soulève des haltères tout seul dans son salon. Quand on se retrouve en combat avec d’autres personnes, c’est autre chose. On réalise, d’abord et avant tout, que quel que soit son niveau de forme, on est fragile : vous pouvez être surentraîné et boosté aux stéroïdes … une balle est une balle et elle vous mettra à terre comme le commun des mortels. Vous pouvez être le meilleur de votre promo … trois racailles stupides avec des battes de baseball vous feront ramasser vos dents avec vos doigts cassés. Le krav-maga est une école de modestie, qui permet à chacun de réaliser quel est son niveau réel. Rien n’est plus précieux que cette lucidité.
Le krav-maga est une école de modestie, qui permet à chacun de réaliser quel est son niveau réel.
MARTIAL
Ce qui m’a aussi frappé, c’est, pour un sport dans lequel les gens ont plutôt des rapports cordiaux et où on tutoie généralement ses enseignants, un sens aigu de la hiérarchie : ils ont beau ne porter que rarement leurs ceintures, les gens connaissent leur niveau, connaissent le vôtre, connaissent celui du prof. On respecte les aînés et les gens plus expérimentés. On encourage ceux qui s’accrochent, même si c’est dur pour eux, et on valorise l’expérience tirée des réussites comme des échecs. Bref : on apprend à connaître sa place.
2 – Un autre regard sur la rue
Désormais, les situations potentiellement risquées m’apparaissent autrement. Auparavant, je classais mentalement les situations en deux catégories : sans risque et dangereuses. Désormais, je les classe en trois : sans risque, gérable, pas gérable. Cela change énormément la façon dont on considère les choses et les événements.
3 – Un autre regard sur les personnes

On apprend aussi à regarder les gens différemment : certains gros balèzes m’apparaissent désormais comme lents et patauds, faciles à gérer en cas de problème. On se prend à imaginer comment on ferait pour neutraliser tel ou tel s’il devenait agressif … bref, on se sent un peu comme un Saïen, mesurant la puissance de tout un chacun. Ça n’a rien du concours de quéquette, d’ailleurs ; c’est plutôt quelque chose en rapport avec les deux points précédents : la conscience de sa propre force et de ses propres faiblesses, comparées à celles des autres.
Quand vous pratiquez le Krav-Maga, vous savez que vous n’êtes pas invincible, loin s’en faut. Mais vous savez aussi qu’un peu d’entraînement vaut mieux que pas d’entraînement du tout, et qu’une séance ou deux par semaine vous rendent déjà bien meilleur que la majorité de la population.
4 – De bons réflexes
En ces temps d’incertitudes, une chose est certaine : nous pouvons tous, un jour ou l’autre, être pris dans un attentat, par exemple. Or, dans une situation comme celle-là, il y a deux choses qui tuent : le terroriste, bien sûr, mais aussi les mauvais réflexes. Mouvements de panique, fuite inconsidérée, héroïsme stupide et autres pertes de sang-froid font partie des actes les plus mortels. Apprendre à se maîtriser, à aller au-delà de ses réflexes pourris, est un avantage indéniable et produit un sentiment de relative sérénité.
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5 – Du pragmatisme
Au Krav-Maga, on apprend que dans une situation risquée, le but, c’est de mettre fin au danger. Cela peut vouloir dire casser la gueule du mec en face. Cela peut aussi vouloir dire se barrer très vite. Rester en vie est la priorité. Les jolis mouvements, les katas parfaits, les gestes élégants, on s’en fout.
D’ailleurs les quelques affrontements amicaux qu’on peut avoir de temps à autre avec des clubs d’autres arts martiaux, plus traditionnels, tournent très souvent à l’avantage des pratiquants du Krav-Maga, même quand ils sont moins au niveau en termes de forme physique. La raison en est simple : un grand nombre de karatekas, par exemple, ou encore de boxeurs thaïs, ne sont pas de vrais combattants. Ce sont de jolis danseurs, qui répètent encore et encore des mouvements appris par cœur. Ils sont très efficaces tant qu’on ne leur demande pas trop d’improviser et qu’on ne les sort pas de leur domaine de spécialisation. Le pratiquant du Krav-Maga, lui, improvise, frappe dans les testicules, mord, attrape par les trous de nez, enfonce ses doigts dans les yeux, ramasse tout ce qu’il trouve par terre pour s’en servir d’arme … en bref : il se bat de façon sale, certes, mais très efficace.
En guise de conclusion :
Non, le Krav-Maga n’est pas à conseiller à tout le monde : c’est très physique, c’est très efficace, et c’est potentiellement dangereux pour vous et pour les autres si vous vous en servez comme un con. De plus, il faut généralement plusieurs dizaines de séances avant de commencer à en ressentir les effets positifs.
Reste que, comme toute technique de combat, il vous apporte des bénéfices mentaux et psychologiques, bien au-delà des seuls bénéfices physiques.
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