Bisphénol : un empoisonnement silencieux

Tout d’abord, pas de paranoïa : nous sommes certes confrontés tous les jours au Bisphénol A, mais c’est bien par la nourriture qu’il nous contamine le plus. Les expositions par le biais d’objets divers sont bien moins dangereuses. Évitez seulement de manger vos DVD (et de ronger vos stylos). Le danger alimentaire, cependant, est déjà largement suffisant : le Bisphénol A contamine les aliments qu’il contient, ce qui nous amène à en ingérer régulièrement.

Mais le Bisphénol A, c’est interdit, non ?

Oui. Depuis janvier 2015, la législation française interdit officiellement le Bisphénol A dans les contenants alimentaires commercialisés sur le territoire. Et pourtant, le produit est encore présent. D’abord parce que certains industriels ne respectent pas la réglementation. Mais aussi parce que, marché ouvert oblige, nos rayons de supermarchés sont remplis de produits venant des quatre coins du monde … et qui ne sont pas tous strictement ni systématiquement contrôlés. Bref : on trouve encore du Bisphénol A dans nos aliments. Moins qu’avant, certes, mais on en trouve.

Beaucoup d’industriels produisant à l’étranger se sont en effet contentés de changer les paquets vendus en France, sans toucher à l’intégralité de leur chaîne de production : le produit reste donc exposé pendant toute sa durée de vie, sauf les quelques derniers jours, quand il est en rayon. De plus, pas mal de producteurs ont tout simplement remplacé le Bisphénol A par d’autres substances, dont le Bisphénol F et le Bisphénol S, que l’on soupçonne fortement d’avoir les mêmes effets.

Plus simplementla plupart des produits en plastique que vous possédez et qui datent d’avant 2015 en contiennent

En 2018, l’Université d’Exeter a testé les urines d’une centaine d’adolescents et a découvert du Bisphénol A chez plus de 85% d’entre eux. Autant dire que nous sommes tous exposés. D’autres études, utilisant des prises de sang, montent même à des estimations pouvant aller jusqu’à 90%, voire 95% des populations des pays industrialisés. Pour la France, ce pourcentage, du fait de la législation, serait inférieur de 5 à 10% à celui de la moyenne européenne. Mais pas davantage. De plus, le Bisphénol A est capable de passer la barrière placentaire : il peut donc affecter les fœtus in utero et les exposer même avant qu’ils ne boivent leur premier biberon.

Les effets du Bisphénol A

On manque d’informations à grande échelle quant aux effets sur l’humain. Des tests ont été menés sur les ouvriers chinois d’une usine de résine de Bisphénol, et leurs résultats sont plus que préoccupants : la majorité d’entre eux souffraient de troubles de l’érection, de troubles du comportement, de pertes d’énergie ou de taux de testostérones anormalement bas.

Des tests plus poussés ont été menés sur des souris, qui ont montré, chez les individus exposés in utero, une augmentation considérable des risques de malformation sexuelle. Plus encore : des individus exposés avant leur naissance, puis tenus à l’écart du Bisphénol A, conservaient de fortes chances de transmettre ces malformations, ce qui suggère que la molécule serait capable de modifier l’information épigénétique (c’est-à-dire de perturber la manière dont s’expriment les gènes).

Chez les femelles, une exposition importante au Bisphénol A peut provoquer :

  • Une puberté plus précoce que la normale
  • Des anomalies du comportement maternel
  • Des anomalies du comportement sexuel (réceptivité supérieure, besoins plus importants, plus grande demande sexuelle)

Chez les mâles, une exposition importante au Bisphénol A tend à entraîner :

  • Une baisse de libido
  • Une baisse du taux de testostérone
  • Une baisse de la fertilité
  • Des problèmes d’érection et d’éjaculation

Pour les petits garçons encore à naître, les effets peuvent être dévastateurs : en bloquant l’émission de testostérone par les testicules durant la grossesse, le Bisphénol peut contrarier la croissance des organes génitaux masculins. Conséquences possibles : variées. Cela peut aller de micropénis à des individus intersexués, génétiquement XY mais dont les organes génitaux ne se sont jamais développés. On a aussi des cas d’hypospadias (déformation sexuelle masculine dans laquelle l’ouverture de l’urètre est mal placée et ne se trouve pas à l’extrémité du pénis) ou de cryptochidie (absence des testicules dans les bourses ; ils sont généralement présents, mais demeurés dans le corps, et souvent sous-développés).

Les effets constatés du Bisphénol varient, mais ils incluent en général troubles du comportement, troubles de la sexualité et problèmes de santé majeurs pour les mâles.

NEO-MASCULIN

Pour les individus exposés durant leur croissance, les effets varient selon les sexes : chez les femelles, on constate surtout une maturation sexuelle précoce. Il est probable que le nombre de petites filles commençant la puberté à 10 ou 11 ans aujourd’hui (alors que l’on sait qu’au XIXème siècle, il était rare que les premières règles apparaissent avant 15 ou 16 ans) soit lié à des expositions massives au Bisphénol. Chez les mâles, les déséquilibres hormonaux provoqués par le Bisphénol peuvent amener à une masculinisation incomplète du corps adulte (silhouette androgyne, mue vocale incomplète avec voix fluette, etc.), à une attirance amoindrie à l’égard des femelles, ainsi, du fait d’une baisse du taux de testostérone, qu’à une baisse des comportements propres aux adolescents mâles habituellement (recherche d’expérience et de limites, révolte, prise de risque, bouffées de violence…). De plus, chez les deux sexes, le Bisphénol est fortement soupçonné d’être un facteur aggravant important en ce qui concerne l’obésité et le diabète.

Tout cela n’a rien que de très normal, et prévisible. En effet, le Bisphénol A agit en tant qu’oestrogène de synthèse. Il exagère donc les traits féminins chez les femelles et tend à neutraliser certains traits masculins chez les mâles. Si l’on ajoute à cela le fait que les hommes vivant en ville consomment avec l’eau du robinet des doses extraordinairement élevées d’oestrogènes (issus des urines des femmes prenant la pilule : les retraitements pour en faire de l’eau consommable de suppriment pas ces hormones), il y a de quoi être inquiet.

Chez les tortues, une exposition importante au Bisphénol a même doté des tortues mâles d’une attirance sexuelle pour les autres mâles. En d’autres termes : elle les a rendus homosexuels. On a même constaté, chez des poissons, des changements de sexe du fait d’une exposition au Bisphénol. Ceci dit, la physiologie des poissons est très différente de celle des êtres humains, et chez plusieurs espèces, le changement de sexe au cours de la vie est normal; le Bisphénol se contente donc de déréguler le phénomène, non de le créer.

Les expériences menées sur les animaux ont également soulevé un point important : les effets du Bisphénol A existent dès des doses assez faibles, atteignent rapidement un palier quand on augmente les doses, et, passé ce palier, et n’augmentent plus avec le dosage. La bonne nouvelle, c’est que cela signifie qu’une personne très exposée ne court pas plus de risques qu’une personne faiblement exposée. La mauvaise nouvelle, c’est qu’il suffit d’une exposition minime pour courir le risque de la totalité des effets.

Les effets hormonaux du Bisphenol sont connus depuis près de 90 ans. Mais personne ne sera poursuivi : les apprentis-sorciers sont trop nombreux, et quand un crime devient à ce point massif, on préfère fermer les yeux.

NEO-MASCULIN

Bisphénol et société

Les pouvoirs publics, en France et en Europe en général, ne semblent guère se soucier du Bisphénol. Le fait que l’interdiction de 2015 ne soit que très partiellement suivie d’effets ne fait pas l’objet de débats. Personne n’a été poursuivi pour la commercialisation massive et silencieuse de ce poison, alors même que ses propriétés en tant qu’œstrogène de synthèse sont connues depuis toujours ou presque (synthétisé en 1891, on a découvert ses propriétés hormonales en 1930). Il est vrai que l’idée d’un empoisonnement massif de la population du fait de la consommation de masse, ça n’est pas très bon pour la croissance. Plus que jamais, une approche frugaliste des choses apparaît comme non seulement saine, mais proprement révolutionnaire.

Aucun phénomène de société n’est mono-causal. Mais l’empoisonnement généralisé au Bisphénol n’est peut-être pas sans rapport avec un certain nombre de comportements contemporains. Ainsi, il est très possible que l’augmentation du nombre des hommes aux silhouettes androgynes, celle des hommes aux comportements immatures ou enfantins même à l’âge adulte, ou encore celle des obèses, ne soit pas seulement une question de choix et de mode de vie. Une intoxication inconsciente au Bisphénol pourrait également y avoir sa part. Tout comme il n’est pas impossible qu’elle ait également sa part dans la vague d’homosexualité qui touche les sociétés occidentales. Bien entendu, il a toujours existé un faible nombre d’individus homosexuels, et ce dans toutes les sociétés humaines (il n’est même pas exclu, pour des raisons en rapport avec le principe de kin selection, qu’il s’agisse d’un avantage évolutif acquis). Mais au regard des effets du Bisphénol sur les comportements, et notamment les comportements sexuels, il reste très probable qu’une partie des gens qui défilent fièrement à la gay pride, pour sincères que soient leurs attirances à un niveau personnel, soient en réalité, et surtout, les victimes d’une catastrophe industrielle et alimentaire de grande ampleur. Un peu comme si les irradiés de Fukushima défilaient en montrant à tous leurs malformations et leurs cancers et demandaient, non à être plaints, non à être soignés, mais bien à ce que l’on poursuive légalement ceux qui les plaignent ou prétendent tenter de les soigner. Des victimes fières de leurs maux, en quelque sorte.

De même, il n’est pas exclu que la libération sexuelle de ces dernières décennies ne doive pas tout aux envies et pulsions naturelles des femmes qu’elle a concerné, mais soit également le résultat, chez elles, d’un empoisonnement au Bisphénol, comme cela a été constaté chez les rongeurs. Là encore, il faut se garder des explications mono-causales. Mais le fait que cette catastrophe sanitaire ait des effets parallèles à ce que la société contemporaine valide et encourage ne peut que laisser songeur : les projets de société modernes ne seraient-ils rien d’autre que l’idéologie d’accompagnement et de justification a posteriori d’un fiasco industriel ?

Cette hypothèse est fort peu politiquement correcte et a peu de chance de recueillir les suffrages des adeptes d’un Progrès à la fois abstrait et arbitraire. Il est vrai que ceux-là n’aiment guère qu’on leur rappelle que, bien souvent, c’est notre corps qui dicte nos comportements, et jusqu’à nos goûts les plus intimes. Au nom de l’idéologie, elle a d’ailleurs été bannie de l’espace du débat public. En l’état actuel des connaissances, elle ne saurait cependant être écartée d’un revers de la main. Mais même si cette hypothèse se révélait finalement fausse, les effets néfastes du Bisphénol sur la santé individuelle, et, partant, sur la société en général, sont plus que suffisants pour tenter d’écarter, autant que faire se peut, ce poison. A titre individuel, fuir tous les contenants en plastique est déjà un bon début. Et c’est déjà loin d’être évident.

Soyez le premier à commenter

Poster un Commentaire

Votre adresse de messagerie ne sera pas publiée.


*