Il pourrait sembler paradoxal, sur un site où par ailleurs on parle rationalité, sexe, BDSM et séduction, d’évoquer la question de Dieu. Et pourtant … une part de spiritualité est, j’en suis persuadé, indispensable à l’équilibre intellectuel et psychologique de l’être humain. Cette part de spiritualité n’a pas forcément à s’exprimer au travers d’une religion établie, ni même, si elle s’exprime dans ce cadre religieux, par le fait de gober benoîtement tout que ce raconte votre curé, votre pasteur, votre rabbin ou autre. En ce domaine comme en bien d’autres, un brin d’esprit critique, de raison et de détachement ne fait jamais de mal. Reste qu’une pratique religieuse régulière présente de sérieux avantages pour l’homme contemporain.
La religion comme échappatoire à la matérialité
Le premier bénéfice que l’on tire de la fréquentation régulière d’une communauté religieuse et de la participation à ses célébrations, pour peu que celles-ci soient sincères et profondes, c’est un sentiment d’échapper, l’espace d’un instant, à la matérialité du monde. Le sacré vous permet d’envisager d’autres dimensions de votre existence que celle qui se limite à l’argent, aux biens de consommation, au sexe et au nihilisme ontologique qui est la marque de fabrique de l’Occident actuel. Prendre une heure, une fois par semaine, pour se placer sur un autre mode, pour entrer dans un temps à part, toucher du doigt le sacré. Dire, redire, des paroles que nos pères prononçaient déjà avant nous, que les pères de nos pères murmuraient eux aussi. S’inscrire dans le temps long, dans la continuité. Se découvrir soudain comme étant plus qu’un simple assemblage de chair et de boyaux. Accéder à sa propre dimension spirituelle, puis redescendre, revenir au monde et jeter sur celui-ci un regard différent.

Beaucoup d’hommes ne connaîtront jamais rien de tout cela, et parce qu’ils ne le connaîtront pas, une part de leur être leur échappera toujours. Ce n’est pas un hasard si la société matérialiste contemporaine rejette le spirituel : qui s’éveille au spirituel prend conscience de la vacuité d’une bonne partie de son existence et se rend compte que tout ne s’achète pas, que les véritables richesses intérieures sont à conquérir par soi-même, pour soi-même.
Affronter la mort
Tout le monde n’a pas fait la paix avec l’idée de sa propre fin. Pour certains, la spiritualité et la religion sont un moyen d’accepter l’idée qu’ils vont mourir. C’est aussi une manière de maintenir un lien avec les disparus, de ne pas les considérer simplement comme un paquet de chair morte, mais comme des âmes vivantes, que l’on rejoindra un jour. Au-delà de l’aspect extérieur, cosmétique, décoratif, la religion (quelle que soit sa dénomination) peut souvent prendre l’aspect d’un simple culte de la terre et des ancêtres. Cet aspect-là est d’ailleurs sans nul doute celui que doit retenir l’homme qui ne se sent lié à aucun culte ni aucune spiritualité officielle : rendre hommage et savoir se montrer reconnaissent envers la terre qui nous nourrit et les pères de nos pères qui dorment sous son sol, comprendre qu’on est le maillon d’une longue chaîne … c’est déjà le début de la religion.
Pour ceux qui manquent de sens moral intrinsèque, l’idée qu’ils seront jugés après leur mort peut également être un puissant moyen de contrôle social et de maintien de la paix civique : ce que le gendarme ne voit pas, Dieu le voit.
Le sens de la communauté
S’intégrer à un groupe religieux, c’est également s’intégrer à une communauté. En notre âge d’éparpillement et d’atomisation des individus, on ignore souvent ce que signifie la communauté. Mais rencontrer des gens qui, sans être de votre milieu social ni professionnel, partagent tout de même une foi avec vous, est bien souvent salutaire : cela vous permet de voir d’autres têtes, de croiser d’autres vie, d’échanger, de vous faire un petit réseau, également. Et un réseau de gens qui, à l’inverse de vos collègues par exemple, partagent au moins une partie de vos valeurs.
Se rendre compte de ce qu’est une communauté, même de petite échelle, permet à l’homme moderne de se rendre compte de tout ce qu’il a perdu, comparé à ses ancêtres. Car au contraire de nous, qui sommes trop souvent des individus isolés et solipsistes, les pères de nos pères vivaient au croisement de plusieurs réseaux communautaires : leur paroisse, leur corporation, leurs liens de vassalité ou de loyauté…
Quand on se rend compte de la force et de la solidité personnelle que peut apporter l’appartenance à une communauté et le sentiment de groupe, on prend conscience de tout ce qui nous a été volé.
Quelque chose de plus grand que nous
Là encore, il s’agit de retrouver un sentiment qui nous est trop souvent inconnu : celui qui, loin de faire de l’Homme la seule mesure de lui-même, loin de lui faire croire qu’il peut tout, qu’il est tout, lui fait prendre conscience non pas de sa petitesse mais de sa place. La religion, en nous mettant en relation avec « quelque chose » (qu’on l’appelle Dieu, la transcendance, le Sacré, Gaïa ou autre importe peu) de plus grand et de plus vaste que nous, ne nous rabaisse pas. Elle nous amène à considérer notre juste place en ce monde. Réaliser que nous n’en sommes pas le centre mais que nous avons un rôle et une mission à y jouer.
Pour les Grecs de l’Antiquité, il n’y avait pas de pire péché que l’hubris. L’hubris, ou démesure, c’est le fait pour un Homme de se prendre pour un dieu, de croire qu’il peut tout, qu’il est tout, qu’il peut échapper à sa condition mortelle. Bref : qu’il peut être autre chose que lui-même, qu’il peut contrevenir impunément à l’ordre cosmique et se moquer des lois du monde. Or nous vivons aujourd’hui en une période d’hubris : les tentatives d’aller vers le transhumanisme, ou encore l’accueil médiatique réservé à la cause transsexuelle/transgenre, en sont témoins. Mais qui se laisse aller à l’hubris se condamne au malheur. Car un Homme ne peut s’accomplir et être parfaitement soi-même que dans le cadre de sa condition humaine. En condamnant l’hubris (qu’elle le nomme ainsi ou non), la religion nous apprend aussi l’amor fati (le fait d’aimer son propre destin, quel qu’il puisse être). Elle ne nous encourage pas à manquer d’ambition, bien au contraire. Mais elle nous rappelle que cette ambition s’inscrit dans un certain cadre : celui de l’existence humaine.

Dieu et la religion ne sont pas (nécessairement) les ennemis de la raison
La rationalité n’a pas à baisser la tête devant la religion. On peut pratiquer une activité spirituelle régulière sans pour autant renoncer à une réflexion individuelle, à son esprit critique ni à sa liberté de penser. Une religion bien comprise et bien pratiquée ne vous empêche pas de penser mais, tout comme elle vous aide à comprendre votre place dans le monde en tant qu’être humain en vous en indiquant les limites, elle vous aide également à borner les frontières de votre intelligence, à comprendre qu’il y a, qu’il y aura toujours, des domaines que l’Homme ne peut appréhender. Cette considération est particulièrement salutaire : en effet, l’idéologie scientiste contemporaine tend à nous faire croire que le cerveau humain est équipé pour comprendre la totalité du réel, que ce n’est qu’une question de temps avant que nous ne percions tous les secrets de l’Univers. Peut-être est-ce vrai. Mais nous n’en avons aucunement la preuve. Le fait que nous n’ayons pas encore trouvé les limites de nos capacités de compréhension du fonctionnement de la Nature ne veut pas dire que ces limites n’existent pas. Admettre que de telles limites existent certainement et qu’il y aura toujours une part d’inconnu que nous ne pourrons approcher que par d’autres aspects que la raison (la foi, l’espérance, l’intuition, l’art…) est nécessaire. Ici encore, il s’agit de lutter contre l’hubris.
Une femme, peut-être…
Tout le monde ne désire pas, ou en tout cas pas tout de suite, trouver une compagne et fonder un foyer. Pour certains hommes, c’est même l’ultime repoussoir. Mais pour ceux qui espèrent rencontrer une compagne digne d’être aimée et avec qui établir une famille, les communautés religieuses peuvent offrir un vivier de candidates potentielles.
Ne vous y trompez pas : le fait qu’une femme fréquente régulièrement un lieu de culte ou prenne part aux célébrations d’une religion en particulier n’assure pas qu’elle soit vertueuse ni qu’elle soit à même de devenir la mère de vos enfants : j’ai par exemple connu une épouse de pasteur qui, un samedi par mois, s’éclatait sans que son mari le sache dans des boîtes à partouzes. Il n’en demeure pas moins que les communautés religieuses restent un lieu privilégié pour faire la rencontre d’une femme de qualité. Bien sûr, cela ne garantit rien. Les femmes de qualité sont rares de toute manière (en nos temps de dévirilisation, les hommes de qualité le sont également). Mais vous avez tout de même beaucoup plus de chances de trouver une compagne imprégnée de valeurs traditionnelles et désireuse d’être une bonne mère et une bonne épouse sur les bancs de votre église, de votre temple ou de votre synagogue qu’au bar d’une boîte de nuit à trois heures du matin.
Vous l’aurez compris : il ne s’agit ni d’encourager au fanatisme, ni de prôner la bondieuserie béate. Il s’agit de pousser l’Homme moderne à retrouver le chemin de sa religion, celui sur lequel ses ancêtres ont marché des millénaires durant. Nous croire plus intelligents, plus brillants, plus illuminés que ne l’étaient nos prédécesseurs est l’une des plus belles conneries que la modernité ait fait entrer dans nos cervelles. Bien entendu, tout le monde n’a pas besoin de Dieu dans sa vie. Mais beaucoup de ceux qui pensent pouvoir s’en passer ne le font que parce qu’ils n’ont jamais réellement essayé de s’y intéresser. Il n’est pas nécessaire d’adhérer à un culte en particulier pour avoir une vie religieuse : développer le sens personnel du sacré ou renouer avec une forme de religiosité naturelle et païenne (se contenter de rendre hommage à la terre et aux ancêtres, par exemple) peut déjà considérablement faire avancer un homme sur le chemin de la spiritualité.
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