Retour vers le hamster : comment les Jeunes Filles voyagent dans le temps

Si on a déjà évoqué le Hamster qui trotte dans la tête des Jeunes Filles précédemment, on est loin d’en avoir abordé tous les pouvoirs. L’une des capacités de cette bête extraordinaire est de pouvoir remonter le temps et changer le cours ou l’interprétation du passé. Et le tout, sans même devoir utiliser une DeLorean ! Il contribue donc à doter les Jeunes Filles de véritables super-pouvoirs.

Aux yeux de beaucoup de femmes, le passé, et même leur propre passé récent, n’existe pas en tant que somme d’événements figée : au contraire, il peut être réécrit à l’infini. C’est l’un des pouvoirs de leur Hamster, capable de réinterpréter et de recontextualiser à peu près tout et n’importe quoi. Ce processus est à l’œuvre quand, par exemple, ayant décidé de vous quitter, elle vous dit qu’elle est malheureuse avec vous depuis des mois. Et ce même si, il y a une semaine encore, elle vous envoyait des mots doux et vous murmurait des Je t’aime à l’oreille. Dans bien des cas, un homme sera, dans une situation de ce type, tenté de croire que la femme est hypocrite : dans sa réalité à lui, une chose et son contraire ne peuvent pas exister en même temps. Il suppose donc que soit elle mentait quand elle disait l’aimer, soit elle ment maintenant quand elle dit qu’elle se sent mal depuis des mois. Eh bien non : elle peut parfaitement avoir été totalement sincère la semaine dernière, et l’être encore maintenant.

En effet, lorsqu’une Jeune Fille change d’avis, que ce soit sur un produit qu’elle ne veut plus acheter, une robe qu’elle ne veut plus porter, un club qu’elle ne veut plus fréquenter ou un partenaire qu’elle ne veut plus consommer, se produit dans sa tête un effet d’interrupteur : tout à coup, la lumière s’allume et le Hamster se met à courir dans sa roue. A courir très, très vite. L’homme confronté à un tel processus croit fréquemment à de la mauvaise foi : il pense que la Jeune Fille tente de nier le passé, de discréditer ce qu’elle a jadis aimé pour justifier, à ses propres yeux, le rejet qu’elle en a. Ce n’est pas aussi simple. En réalité, à l’issue du processus, elle croit réellement qu’elle n’a jamais réellement aimé cette personne, cette robe, ce club, ou, tout au moins, que cela fait longtemps qu’elle sent que quelque chose ne va pas.

Une notion dynamique du réel

Pour une Jeune Fille, la réalité n’est pas définie par des faits objectifs. Elle est définie par l’idée qu’elle se fait de la réalité, par son état émotionnel du moment et par ses caprices.

MARTIAL

Pour une Jeune Fille, la réalité n’est pas définie par des faits objectifs. Elle est définie par l’idée qu’elle se fait de la réalité, par son état émotionnel du moment et par ses caprices. Quand un être viril est confronté à une émotion, il cherche généralement à en identifier la cause ; il se demande si cette émotion est raisonnable dans le contexte où il se trouve et, si elle ne l’est pas, la réprime. Dans tous les cas, il fait une différence stricte entre la réalité telle qu’elle est et les sentiments qu’il en a. Il n’en va pas de même pour la Jeune Fille : pour elle, ce sont bel et bien ses émotions qui définissent le réel. Pourquoi donc aurait-elle cette méfiance à l’égard d’Untel, s’il n’y avait pas de bonnes raisons de s’en méfier ? Pourquoi serait-elle attirée par Tel Autre s’il n’était pas à coup sûr un type formidable ? Pourquoi se sentirait-elle mal avec son copain du moment si ce dernier n’était pas, au fond, un sale type ? Pourquoi se sentirait-elle triste s’il n’y avait pas, quelque part dans son entourage, quelqu’un dont c’est la faute ?

Ce processus s’appuie sur trois principes essentiels :

  1. La Jeune Fille ne se trompe pas : elle a toujours raison et ses intuitions et sentiments aussi.
  2. Si malgré tout la Jeune fille se trompe, c’est qu’elle a été trompée : en cas d’erreur de sa part, elle est donc forcément une victime
  3. Les faits importent uniquement quand ils permettent de soutenir le point de vue de la Jeune Fille. Le réel n’est pas un concept immuable ni statique ; au contraire : à bien des égards, la Jeune Fille est une magicienne, puisqu’elle estime qu’il lui suffit de croire assez fort à quelque chose pour que cette chose devienne réelle.

Une autre vision du monde

Du point de vue d’un être viril et rationnel, une telle manière de réfléchir relève de la folie furieuse. Ainsi, là où la virilité et la raison le pousseront à se dire Tiens, petit coup de blues, aujourd’hui. Peut-être le climat, ou le manque de lumière, qui me tape sur les nerfs ? Ou juste un peu de fatigue ?, la Jeune Fille, elle, dira Je me sens triste. C’est toi qui me rends triste et trouvera ensuite une raison pour justifier cela (On ne fait pas assez de choses ensembleTu ne t’occupes pas assez de moi, Tu as oublié notre non-anniversaire, parce que le 17 de ce mois, ça fera tout juste quatre mois et trois semaines qu’on est ensemble). La différence majeure entre l’un et l’autre est donc que le premier (l’être viril) a pris note de son état émotionnel, a supposé que celui-ci pouvait provenir de causes intérieures (son manque de sommeil, sa manière de réagir au climat…) et ne s’est pas laissé influencer par lui. La Jeune Fille, a l’inverse, a fait de son état émotionnel l’alpha et l’oméga de la réalité. Dans l’univers qui est le sien, on ne peut rien faire contre ses propres émotions.

Ce type de situation est le début de bien des disputes conjugales qui ne mènent à rien. En effet, si l’homme, dans un cas comme celui-ci, tente d’argumenter et d’apporter des réponses rationnelles au mal-être de sa compagne, non seulement ça ne va rien changer, mais il est bien possible que cela empire son état. Elle est plongée dans ce sentiment pour des raisons irrationnelles, ça n’est pas la logique qui va l’en sortir. Ce qui est raisonnable ou rationnel lui importe peu : pour reprendre l’exemple de la tristesse, quand la Jeune Fille est triste, lui expliquer qu’en réalité on n’a rien fait pour générer cet état et que c’est elle qui se trompe ne sert à rien. Elle est triste et c’est tout. Ce qu’elle attend de son interlocuteur, ce peut être :

  • de l’écouter et de la rassurer, en mode paternaliste
  • de l’ignorer et de la ramener au Cadre, en lui rappelant qu’elle est adulte
  • de se soumettre et de la plaindre, en faisant tout pour apaiser son état (servir de tampon périodique à son écoulement émotionnel, donc)

Au fond des yeux du Hamster : deux puits noirs, véritables trous dans la trame de l’Espace-Temps, permettant à la Jeune Fille de modifier le passé à sa convenance.

MARTIAL

Le Hamster révisionniste

La tendance au révisionnisme historique existe à tous les égards chez la Jeune Fille mais elle n’est jamais aussi forte que quand elle repense à ses relations passées. Quand la flamme s’éteint, quand, comme le chantait Rutebeuf, l’amour est morte, l’idée qu’elle ait pu, autrefois, être dans un autre état d’esprit que celui dans lequel elle se trouve aujourd’hui lui devient absurde, impensable, impossible. Il est impossible qu’elle ait aimé ce mec, qu’aujourd’hui elle méprise : donc elle a seulement cru l’aimer. Si elle a cru l’aimer, c’est qu’il a tout fait pour qu’elle y croie. S’il a tout fait pour qu’elle y croie, c’est qu’elle a été manipulée. Si elle a été manipulée, c’est presque comme si elle avait été violée. Par voie de conséquence, elle est, d’abord et avant tout et surtout à ses propres yeux, une victime. Et leur ex compagnon, forcément un manipulateur, un pervers narcissique, un sadique, un sale type, etc.

Le statut de victime est un statut merveilleux, et que la Jeune Fille recherche par-dessus tout. En effet :

  • Une victime est avant tout à plaindre, non à juger.
  • Une victime n’a pas à remettre en question ses actes : elle n’a rien fait de mal, elle a seulement subi.
  • Une victime n’a pas à se demander quelle part elle a pris à son propre malheur : elle est pure et vierge de tout reproche.

Grâce à ce merveilleux statut, la Jeune Fille est donc capable d’aller d’homme en homme et d’histoire en histoire sans jamais rien apprendre et sans jamais remettre en question ses propres méthodes, ni sa propre façon d’être.

Soyez le premier à commenter

Poster un Commentaire

Votre adresse de messagerie ne sera pas publiée.


*