Transsexuels et transgenres : existent-ils vraiment ?

On parle beaucoup, ces temps-ci, de sexe, de genre, de transsexuel et de transgenres. Le préfixe trans, qui signifie en latin “de l’autre côté”, indique un changement, un passage d’un sexe à un autre ou d’un genre à un autre. Mais est-ce réellement possible ? Le terme est-il approprié ? Celui qui veut comprendre le réel doit apprendre à bien le désigner, car comme le disait Camus : Mal nommer les choses, c’est ajouter au malheur du monde. Penchons-nous donc un instant sur les définitions de ces termes et voyons ce qu’ils recouvrent au juste. 

Le sexe existe

Le sexe d’un individu, c’est son identité physique, mâle ou femelle. Il existe deux sexes chez les êtres humains : les mâles (hommes) et les femelles (femmes). Les mâles sont les individus qui ont une paire XY de chromosomes. Les femelles sont les individus qui ont une paire XX de chromosomes. La nature chromosomique de chacun est déterminée par le type de spermatozoïde paternel (X ou Y) ayant rencontré l’ovule maternel (qui est toujours X) : nous sommes donc mâle ou femelle depuis notre conception. Chacun des deux sexes dispose de caractères physiques distinctifs. Ces caractères permettent de reconnaître facilement les membres d’un sexe ou d’un autre sans avoir à procéder à un examen génétique. Ces caractères sont, en général :

  • Pour les hommes : pilosité corporelle importante, pilosité faciale, haute taille, musculature importante, organes sexuels externes.
  • Pour les femmes : pilosité corporelle faible, pas de pilosité faciale, taille plus menue, poitrine et fesses plus importantes, organes sexuels internes.

Ces caractères, toutefois, ne sont qu’indicatifs : un individu peut ne pas disposer d’un caractère de son sexe sans pour autant ne pas y appartenir. Ainsi, un homme qui se rase ne devient pas une femme pour autant. Une femme qui perdrait ses seins (par exemple suite à un cancer) ne devient pas non plus un homme. Un homme perdant son appareil génital devient un castrat ou un eunuque, mais il ne devient pas une femme.

Le genre existe

Ce qu’on appelle le genre, c’est la manière dont un sexe ou un autre est perçu par une société donnée : quels sont les rôles, les attitudes, les manières de se comporter et de se vêtir, les obligations, les tabous et les règles qu’une société donnée et une époque donnée assignent à ce sexe. C’est une notion intéressante, parce qu’elle souligne qu’on n’est pas un homme ou une femme dans une société occidentale du XXIème siècle comme on était homme ou femme au Moyen-Âge, ni comme on l’est dans une société d’une autre culture. Cela montre que les êtres humains sont faits d’au moins autant de culture que de nature et qu’on ne peut nier ni l’une, ni l’autre.

Pour simplifier, on peut dire que si le sexe indique les différences biologiques entre hommes et femmes, le genre indique leurs différences sociales.

Les transsexuels n’existent pas

La notion de transsexualité est en revanche absurde : dans la mesure où le sexe est déterminé par nos chromosomes et que ceux-ci ne peuvent pas être changés, il est impossible, pour un humain, de passer d’un sexe à un autre (sauf si on croit à la réincarnation, mais ceci est une toute autre histoire; par ailleurs, certains animaux, comme les poissons clown, font ça très bien, mais nous ne faisons pas partie de la même espèce). Il n’y a donc pas, à proprement parler, d’individus transsexuels. Les personnes que l’on désigne comme telles relèvent en général de deux catégories bien distinctes :

  • Les personnes intersexuées (dont le sexe physique est difficile à déterminer), telles, par exemple, que les hermaphrodites. Ces cas sont rares et relèvent de la malformation génétique. Ces individus existent mais il s’agit, stricto sensu, de personnes handicapées de naissance. Les considérer comme pertinents pour tirer une vérité générale aurait autant de sens que de considérer que puisqu’il existe des siamois, on ne peut pas dire que les humains ont deux bras, deux jambes, un torse et une tête. Les exceptions ne suffisent pas à infléchir une règle générale. Cela ne veut pas dire que ces personnes n’existent pas. Mais elles ne sont pas transsexuelles, puisqu’elles sont nées ainsi et n’ont donc pas subi de transformation
  • Des personnes nées hommes ou femmes et qui, pour des raisons diverses, ont acquis tout ou partie des caractères physiques de l’autre sexe et/ou perdu tout ou partie des caractères physiques de leur sexe, au prix de coûteuses et dangereuses opérations chirurgicales et de traitements hormonaux lourds. Ces personnes restent cependant des hommes ou des femmes, comme elles l’ont toujours été depuis leur conception, puisqu’elles conservent les mêmes chromosomes. Mais des hommes ou des femmes charcutés, mutilés, amputés. De la même manière qu’un homme qui se rase ne devient pas une femme, un eunuque avec des implants mammaires n’en devient pas une non plus : il reste un eunuque avec des implants mammaires. Seul un changement au niveau chromosomique pourrait faire de ces personnes des transsexuels. Ce qui est impossible. Leur changement physique n’est donc qu’une forme avancée de travestissement. 

On pourrait comparer cela à l’identité ethnique : si je suis né Blanc, je le resterai toute ma vie. Je peux aimer ou ne pas aimer cela, je peux m’en réjouir ou le déplorer, je peux même prétendre qu’au fond de moi je me sens Noir : ça ne changera rien, parce que l’opinion que j’ai du réel ne change rien au réel lui-même. Et même si, au prix de mille opérations de chirurgie esthétique, je parvenais à avoir l’aspect extérieur d’un Noir, cela ne changerait toujours rien : je porterais toujours les gènes d’un Blanc, et ma descendance, conçue avec une Blanche, serait également Blanche, et non pas métissée. Je peux être un Blanc déguisé en Noir si ça me chante mais je ne peux jamais être un transethniste. Ces distinctions sont importantes pour qui souhaite conserver un minimum de raison et de clarté d’esprit. En effet, nous sommes régulièrement abreuvés de nouvelles étonnantes, comme l’histoire de Chloe Allen ou celle de Trystan Reese. Le problème, c’est que Chloe Allen n’est pas une femme, et Trystan Reese n’est pas un homme. Sitôt que l’on rétablit la simple vérité biologique, leurs histoires semblent tout de suite moins impressionnantes ou extraordinaires. Celle de Trystan Reese, en particulier, peut se résumer à : Une femme a eu un bébé. Chose qui, on en conviendra, ne constitue pas vraiment un énorme scoop…

Les transgenres n’existent pas non plus

Il existe aussi des personnes qui se disent transgenres, et qui, sans pour autant subir d’opérations chirurgicales, adoptent les codes vestimentaires et comportementaux de l’autre sexe. On parle de transgenres par opposition à cisgenres (personnes se comportant comme on attend que des personnes de leur genre se comportent; en termes plus clairs et politiquement très incorrects : personnes normales). Le problème, c’est que les transgenres n’existent pas non plus. En effet :

  • Soit la personne sait qu’elle est en réalité un homme ou une femme, et sa manière de s’habiller correspond à une envie personnelle, un fantasme, le regret de ne pas être né(e) de l’autre sexe, ou autre. Il s’agit en ce cas d’un travesti. Il y en a toujours eu, il y en aura toujours et il y a même des gens que cela attire. Il n’y a aucune raison de se moquer d’eux ni de les mépriser mais aucune raison non plus de les appeler autrement que par leur nom.
  • Soit la personne est sincèrement persuadée qu’elle appartient à l’autre genre et qu’elle est, en quelque sorte par erreur d’aiguillage karmique, coincée dans un corps ne correspondant pas à ce qu’elle croit être son identité. En ce cas, c’est quelqu’un qui a un souci avec le principe de réalité : il s’agit d’une personne qui pense que sa propre croyance vaut plus que le réel et que le reste du monde doit s’adapter à son opinion. Mais si vous revêtez un costume de Superman, vous ne devenez pas Superman (essayez de vous envoler, vous verrez…), même si vous y croyez très très fort : vous devenez un type déguisé en Superman. De la même manière, revêtir un costume de femme ne fait pas d’un homme une femme : cela fait de lui un homme déguisé en femme, rien d’autre. Le réel ne se plie pas magiquement à nos désirs, sans quoi nous serions Dieu. Une personne croyant se transformer par le seul effet de sa foi n’est pas plus légitime dans sa croyance qu’une autre qui se prendrait pour Napoléon. Tant qu’elle n’est dangereuse ni pour elle-même ni pour les autres, il n’y a aucune raison d’en faire un drame mais la société n’a pas à se préoccuper d’elle plus que de n’importe quel autre fou. Car c’est bien de folie qu’il s’agit : quelqu’un qui croit que son attitude, son habillement ou la manière dont il se sent suffisent à définir son genre est une personne qui croit qu’un chat qui dort dans une niche est un chien, ou qu’une voiture roulant sur une piste cyclable est un vélo.

Par ailleurs, il y a derrière le concept de transgenre une idée fondamentalement fausse : celle que l’on pourrait choisir son genre. Ce n’est pas vrai : le genre est une construction collective, créée par la société dans laquelle nous vivons et projetée sur nous par l’ensemble de cette société. Si nous sommes homme, la société plaque sur nous une identité genrée d’homme ; si nous sommes femme, une identité genrée de femme. On peut parfaitement se sentir mal à l’aise avec cette identité imposée. On peut même la rejeter ou la combattre. Mais on ne peut pas s’en tailler une sur mesure et prétendre qu’il s’agit d’un genre, puisque le genre est le produit d’une culture, et non de la manière dont nous nous sentons. La culture d’une société ne peut pas être modifiée en un coup de baguette magique : c’est un long processus de sédimentation, qui prend plusieurs générations.

Bien entendu, il y a des gens qui se sentent mal dans ce genre, qui souffrent de cette identité culturelle que la société leur impose, qui aimeraient être autre chose. C’est vrai. Ces gens-là existent et leur souffrance psychologique est tout à fait réelle. Mais pour réelle qu’elle soit, cette souffrance ne change rien à ce qu’ils sont pour autant.

Troisièmes genres

Il a existé et existe encore, au sein d’un certain nombre de cultures, des places réservées à des individus hors normes, dont le statut sexuel et genré se situe en dehors des codes habituels. C’est notamment le cas des différents ordres d’eunuques sacrés (les Galles au sein du clergé antique de Cybèle, par exemple, ou encore les Hijra en Inde). On pourrait éventuellement, dans ces cas précis, parler de transgenres : il s’agit en effet de personnes nées hommes, et qui ont adopté (volontairement ou pas) un mode de vie et des codes correspondant non à des femmes (même caricaturées), mais à un autre type d’individus, généralement asexués, définis par la société dans laquelle ils vivent et y assumant un rôle précis. Un point important est à noter : dans les cas des Galles comme dans celui des Hijra, la transformation physique est supposée s’accompagner d’un éveil spirituel. L’eunuque renonce à sa virilité pour acquérir une autre vision du monde et endosser un rôle mystique. D’une certaine manière, la castration physique en plus, c’est la même chose que le moine, qui renonce aux plaisirs de la chair pour se consacrer à Dieu. La grande différence avec nos transgenres occidentaux contemporains réside dans le fait que les Hijra ou les Galles ne prétendent pas devenir membres d’un autre sexe ni d’un autre genre commun : ils accèdent à un statut à part, qui en fait tout à la fois des parias et des êtres sacrés. De plus, ils appliquent ce faisant des codes existant déjà dans leur société et se réfèrent à une tradition culturelle aux racines profondes. Ce n’est pas le cas dans la société occidentale contemporaine.

En conclusion

Il est primordial de bien nommer les choses : c’est le langage qui structure la pensée et générer des catégories intellectuelles correctes est indispensable à une pensée claire et efficace. Le problème que posent les transgenres et transsexuels aujourd’hui n’est pas réellement un problème de société : il y a toujours eu et il y aura toujours des travestis et ils sont de nos jours plutôt acceptés. Ils peuvent bien évidemment avoir du mal à trouver du travail dans certains milieux mais ce serait le cas de n’importe quel individu qui déciderait de s’habiller et de se comporter autrement que selon les codes définissant ce que la société attend de lui : si vous allez à un entretien d’embauche déguisé en viking et expliquez que telle est votre identité, attendez-vous à avoir des soucis pour trouver du boulot. Il ne s’agit pas là d’injustice ni de discrimination intolérable : vous faites un choix, il vous concerne, les autres réagissent en fonction de ce choix mais en aucun cas ils n’ont à assumer les conséquences de vos actes. Vous êtes responsable de ce que vous faites. Par ailleurs, les sociétés occidentales garantissent aux “transsexuels” et “transgenres”, comme à tout un chacun, l’égalité avec les autres citoyens devant la loi, ce qui est à peu près tout ce qu’on puisse raisonnablement exiger d’elles (sauf à prétendre vouloir se tailler des privilèges personnels).

Bien évidemment, quand on se demande si transsexuels et transgenres existent, on ne remet pas en cause l’existence des individus qui se réclament de cette idéologie. Mais il convient, pour l’homme de raison, de prendre conscience d’à quel point cette idéologie, puisque c’en est une, pose problème. Le problème premier que posent “transsexuels” et “transgenres” est d’ordre sémantique. En créant des termes ne correspondant pas au réel, on crée aussi des problématiques et des catégories artificielles. Et tant qu’on s’occupe de problèmes artificiels, on ne se penche pas sur le réel. Il y a des gens que ça arrange. Se pencher sur des problèmes illusoires est un bon moyen de faire du virtue signaling, par exemple, sans que cela implique quoi que ce soit de concret pour le gros de la population.

Le second problème, et le plus important, est un problème cognitif et éthique : l’idéologie qui se cache derrière celle d’un grand nombre de tenants de la cause trans, c’est qu’au fond, le sexe physique (donc le corps) n’a pas d’importance, que la société dans laquelle on évolue (donc la culture) n’a pas d’importance non plus et que seul compte l’individu, libre de s’auto-définir en tout et unique mesure de lui-même. Ce n’est pas là une pensée individualiste au sens réel du terme mais bien plutôt une dangereuse tentation du solipsisme : rien n’existe, rien ne compte, ni la société, ni la biologie, ni le regard que l’on pose sur moi; seul mon caprice est légitime à définir le monde. Je suis autorisé à me vêtir et à me comporter comme bon me semble, et cela ne doit avoir aucune conséquence : les autres ont le devoir de s’adapter à mes caprices. C’est une éthique de la liberté sans responsabilité. A ce titre, les trans ne sont pas un problème en eux-mêmes (démographiquement parlant, ils ne sont rien ou si peu), mais bien un symptôme : celui d’une civilisation en train de perdre souffle, éclatée en une myriade d’identités individuelles toutes plus marginales les unes que les autres et incapable de dire le Vrai, le Beau, le récit général, la norme, et dans laquelle la poursuite non du bonheur (le trans, en tant qu’être fondamentalement insatisfait de ce qu’il est, ne saurait être heureux) mais bien de la vanité individuelle est devenue la seule valeur partagée. Les transgenres ne sont donc ni à mépriser, ni à blâmer, ni même réellement à plaindre : idiots utiles d’un système global, ils ne sont que l’incarnation d’une époque ayant perdu le sens de la mesure et qui se plaît à croire qu’il existe des solutions techniques (chirurgicales, en l’occurrence) au vide existentiel qui ronge les individus.

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